Le microbiote intestinal, ce vaste écosystème de micro-organismes qui réside dans notre intestin, est un partenaire essentiel pour notre santé globale. Composé de milliards de bactéries, de virus, de champignons et d’autres microbes, le microbiote joue un rôle crucial dans de nombreux aspects de notre bien-être, allant de la digestion à l’immunité en passant par la santé mentale et le sommeil.
Dans cet article, nous verrons comment ces micro-organismes peuvent avoir un effet sur la durée, la qualité et la régularité de notre sommeil. Découvrez comment prendre soin de notre microbiote peut contribuer à des nuits paisibles et réparatrices.
Le microbiote intestinal et le système nerveux
Plus de 80% de la sérotonine, neurotransmetteur appelé plus communément « l’hormone du bonheur », étant produite dans l’intestin, que le microbiote ait une influence sur notre sommeil et inversement nous semble plutôt logique.
La sérotonine est impliqué, dans le système nerveux central, dans de nombreuses fonctions parmi lesquelles les rythmes circadiens, le cycle veille/sommeil, la régulation de l’humeur, l’appétit… Dans le système nerveux entérique, la sérotonine est produite en majorité par les cellules entéro-endocrines du tube digestif pour mobiliser le système immunitaire en cas d’infection tout en protégeant les neurones des effets délétères de l’inflammation.
Sans cette sérotonine, nous ne pourrions produite de mélatonine, l’hormone du sommeil, qui elle est sécrétée par la glande pinéale, dans le cerveau, en l’absence de lumière. La mélanine est en effet synthétisée à partir de la sérotonine qui elle-même est synthétisée par le tryptophane, un des 9 acides aminés essentiels dont nous reparlerons un peu plus bas.
Impact du microbiote sur les hormones régulatrices du sommeil
Parmi les multiples mécanismes par lesquels il agit, le microbiote entretient une relation complexe avec les hormones clés impliquées dans la régulation du sommeil et du rythme circadien, notamment la mélatonine et le cortisol.
La mélatonine, souvent surnommée l’hormone du sommeil, est sécrétée par la glande pinéale en réponse à l’obscurité, signalant à notre corps qu’il est temps de se préparer au repos. Le microbiote joue un rôle crucial dans cette cascade hormonale en influençant la production de mélatonine. Des recherches récentes suggèrent que certaines souches bactériennes, notamment celles appartenant aux genres Lactobacillus et Bifidobacterium, peuvent stimuler la production de mélatonine. En revanche, un déséquilibre du microbiote, appelé dysbiose, peut perturber cette production, entraînant des difficultés à s’endormir et des troubles du sommeil.
Le cortisol, quant à lui, est une hormone sécrétée par les glandes surrénales en réponse au stress et qui suit un rythme circadien. Pendant la journée, les niveaux de cortisol augmentent, favorisant l’éveil et la vigilance, tandis que la nuit, ils diminuent pour permettre le repos. Le microbiote intestinal participe à la régulation de ces niveaux de cortisol en influençant le fonctionnement de l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien (HPA), responsable de sa production. Un microbiote déséquilibré peut induire une dysfonction de l’axe HPA, entraînant une perturbation du rythme circadien du cortisol et contribuant ainsi à des troubles du sommeil et à une mauvaise qualité du repos.
Le microbiote et les troubles du sommeil
Plusieurs études ont démontré que le microbiote intestinal était essentiel au maintien de la physiologie normale du sommeil. Des habitudes et durées de sommeil « anormales » pourraient affecter la composition, la diversité et le fonctionnement de notre flore intestinale, à travers l’axe intestin-cerveau.
Des chercheurs du King’s College de Londres ont mené une étude de cohorte pour identifier l’influence du rythme de sommeil sur le microbiote intestinal. Leurs résultats ont même été publiés dans The European Journal of Nutrition.
Une des premières découvertes de cette étude se porte sur l’importance de se lever à la même heure tout au long de la semaine. En effet, même le simple décalage entre l’heure de lever les jours de travail et les jours de congé pourrait avoir des répercussions majeures sur notre flore intestinale. Seulement 90 minutes de décalage dans nos horaires de sommeil seraient nécessaires pour perturber la composition de notre microbiote et favoriser le développement de micro-organismes pathogènes.
Les décalages dans les horaires de sommeil entre les jours de travail et les week-ends sont souvent liés à de mauvaises habitudes alimentaires, généralement moins saines avec une forte tendance à consommer davantage de boissons sucrées, d’alcool et de graisses saturées, et moins de fruits, légumes et de noix.
Dans l’étude mentionnée plus haut, les chercheurs ont identifié 3 espèces de bactéries intestinales particulièrement nombreuses chez les personnes souffrant de décalage horaire social important : deux espèces de Clostridia et une de Peptococcaceae, associées à des problèmes de santé comme l’obésité et certaines maladies cardiométaboliques, tout en favorisant les inflammations et les risques d’accidents cardio-vasculaires.
Stratégies pour améliorer le microbiote et favoriser un sommeil de qualité
Nous venons de le voir, la régularité des habitudes de sommeil tout comme l’alimentation peuvent avoir un impact significatif sur la santé de notre microbiote intestinal.
Voici nos 4 conseils pour prendre soin de son microbiote :
Consommer des aliments riches en prébiotiques permettant de nourrir les bonnes bactéries du microbiote
- Légumes : artichaut, asperge, brocoli, choux, aubergine, fenouil, oignon, poireau, champignons, endive…
- Fruits : bananes peu mûres, prune, agrumes, pommes, poires…
- Céréales complètes : petit épeautre, seigle, orge, avoine…
- Légumineuses : fèves, haricots secs, pois cassés, pois chiches, lentilles…
- Graines et noix : noix de cajou, noix, noisettes, graines de tournesol, de courge, de lin, de chia, de sésame…
- Algues et petits poissons gras (sardines, maquereaux…)
- Huiles oméga-3 : lin, colza, noix, caméline…
- Huile d’olive
- Thé, chicorée, caroube
- Epices : cannelle, gingembre, poivre noir, origan…
Consommer des aliments probiotiques pour soutenir le microbiote
- Légumes lactofermentés : choucroute crue, betterave…
- Kéfir
- Kombucha
- Soja fermenté : tamari, miso, natty…
Limiter le plus possible les aliments ennemis du microbiote
- Sucres en excès : pain blanc, gâteaux, viennoiseries, jus de fruits, sirop de glucose-fructose…
- Graisses saturées en excès : charcuterie, viande rouge, fromage…
- Pesticides (privilégier le bio)
- Additifs (lire les étiquettes et limiter les produits ultra-transformés)
- Alcool
- Edulcorants : aspartame, sorbito, xylitol, maltitol, mannitol…
- Sel : plats préparés, fromage, bouillon cube, sauce soja, biscuits apéritif…
- Les cuissons intenses : fritures, barbecue
- Les régimes privatifs
Adapter son hygiène de vie
- Pratiquer une activité physique régulière
- Prendre soin de son mental : relaxation, méditation, yoga…
- Dormir suffisamment et à des horaires réguliers
- Privilégier la cuisine maison
- Privilégier une alimentation bio, de saison et variée
- Privilégier les cuissons douces : vapeur, étouffée
- Augmenter sa consommation de protéines végétales : tofu, quinoa, associations céréales complètes + légumineuses
- Adopter un petit déjeuner gras protéine et peu sucré
- Augmenter son apport en Oméga-3 : petits poissons gras, huiles végétales (lin, caméline, colza…)
En conclusion, il est devenu de plus en plus évident que notre microbiote intestinal joue un rôle crucial dans la qualité de notre sommeil et, par extension, dans notre santé globale. Les interactions complexes entre le microbiote et les hormones telles que la mélatonine et le cortisol influencent directement notre capacité à nous endormir, à rester endormis et à nous réveiller rafraîchis et revitalisés.
En prenant conscience de cette connexion profonde entre notre intestin et notre sommeil, nous avons maintenant l’opportunité de prendre des mesures proactives pour soutenir notre microbiote et améliorer notre bien-être. En intégrant des aliments riches en fibres, en prébiotiques et en probiotiques dans notre alimentation, en gérant efficacement notre stress et en adoptant un mode de vie sain, nous pouvons favoriser un microbiote équilibré et promouvoir un sommeil de qualité.
N’oubliez pas que chaque petit changement compte. En suivant les conseils proposés dans cet article et en prenant soin de votre microbiote intestinal, vous pouvez non seulement améliorer la qualité de votre sommeil, mais aussi renforcer votre santé globale et votre bien-être. Alors, engagez-vous dès aujourd’hui à cultiver un microbiote sain et à profiter des nombreux bienfaits d’un sommeil réparateur. Votre corps et votre esprit vous en seront reconnaissants.
Sources :
Exploring the relationship between social jetlag with gut microbial composition, diet and cardiometabolic health, in the ZOE PREDICT 1 cohort